Pour honorer ses fonctions de planification des sillons et d’établissement de l’horaire annuel, le SAS mandate, en vertu de l’article 9f LCdF, les GI relevant de son domaine de compétence pour planifier l’horaire sur leurs réseaux respectifs.
Les exigences posées aux GI pour l’établissement de l’horaire sont consignées dans des contrats quadriennaux, que le SAS publie sur son site Internet. Ceux-ci définissent les prestations que le SAS attend des GI ainsi que les coûts, à hauteur desquels le SAS les indemnise pour cette mission. Le SAS veille au respect desdits contrats par le biais de contrôles réguliers et de discussions institutionnalisées avec les GI concernés.
Le coup d’envoi des travaux pour la période contractuelle 2025-2028 a été donné en 2023. Dès l’automne, le SAS a demandé aux GI de lui fournir leurs premières offres. Il les a examinées et en a discuté avec eux. En outre, les négociations relatives aux contrats d’horaire ont été engagées, en priorité avec CFF Infrastructure, le GI à la tête du plus vaste réseau de lignes interopérables de Suisse.
Le SAS s’investit également dans l’élaboration des plans d’utilisation du réseau, qui sont soumis à l’approbation de l’OFT. À cet égard, il accompagne CFF Infrastructure dans la conception des plans et se prononce sur les projets dans le cadre de la procédure de consultation. Sa mission consiste essentiellement à garantir le bon déroulement de la procédure et sa conformité aux prescriptions réglementaires, en particulier lorsque des chantiers ou des opérations de maintenance réduisent temporairement les capacités.
Restrictions de capacités de longue durée sur les axes nord-sud
Le processus de commande et d’attribution des sillons dans l’horaire annuel 2024 a été une véritable gageure pour les services chargés de la planification. Les trois chantiers de grande envergure de Mumpf, Stresa–Arona et Rastatt ont à eux seuls fortement réduit le nombre de sillons disponibles sur les axes nord-sud durant sept mois et demi, entraînant plus de 900 conflits de commandes de sillons pour l’horaire 2024, dont 85% sur l’axe du Saint-Gothard.
Pour résoudre ces conflits, le SAS recherche – d’abord en concertation avec les commanditaires de sillons et les planificateurs de l’horaire des GI – d’autres solutions qui permettent de faire circuler les trains planifiés dans des conditions commerciales acceptables. Cette démarche n’ayant toutefois pas abouti pour une cinquantaine de demandes de sillons en trafic marchandises, le SAS aurait dû les refuser à la date ordinaire d’attribution des sillons en août 2023, ce qui aurait empêché la circulation d’environ 170 trains de marchandises planifiés par semaine durant les différentes phases de restriction des capacités.
Faisant suite à la demande du secteur du fret, le SAS a adapté la procédure avec le concours de l’ensemble des parties concernées (CFF Voyageurs, branche du transport de marchandises, CFF Infrastructure, OFT et RailCom) et avec leur accord. Décision a été prise de coordonner courant novembre les demandes de sillons incompatibles entre elles durant les phases de restriction des capacités car, à cette période de l’année, les ETF auront conclu des contrats fermes avec les milieux expéditeurs.
Toutefois, le déraillement d’un train de marchandises dans le tunnel de base du Saint-Gothard le 10 août 2023 a changé radicalement la donne. Le tunnel de base du Saint-Gothard a dès lors limité encore davantage les capacités déjà restreintes sur l’axe nord-sud. Le personnel en charge de la planification chez CFF Infrastructure, au sein des ETF et du SAS a été largement mobilisé pour gérer l’événement et replanifier les trafics par séquences.
Les premières heures et les premiers jours qui ont suivi l’événement, la priorité était de garer les trains bloqués, de les détourner et de les faire parvenir à destination dans les meilleurs délais. La gestion de cette phase opérationnelle délicate s’est déroulée sous l’égide de CFF Infrastructure, compétente en l’espèce.
Une fois que l’on a eu connaissance de l’étendue exacte des dégâts et de la possibilité d’emprunter les tronçons non endommagés du tunnel, des concepts de circulation garantissant la sécurité de l’exploitation ont pu être élaborés. Aussi l’OFT a-t-il de nouveau ouvert le tube est du tunnel de base du Saint-Gothard à la circulation des trains de marchandises dès le 23 août 2023 et autorisé la circulation de quelques trains de voyageurs durant les week-ends dès le 29 septembre 2023. Le SAS s’est chargé de coordonner les exigences d’utilisation des ETF et d’attribuer les sillons.
Le concept élaboré pour la période consécutive au changement d’horaire du 10 décembre 2023 a permis à un plus grand nombre de trains de voyageurs d’emprunter le tunnel de base du Saint-Gothard durant les week-ends dans le sens principal de circulation. Il a donc fallu revoir à nouveau la planification des trains de marchandises, pour lesquels des ajustements et des trésors d’ingéniosité ont été nécessaires afin de coordonner l’ensemble des demandes.
Fin novembre 2023, le SAS attribuait tous les sillons empruntant le tunnel de base du Saint-Gothard pour la période s’étendant jusqu’à Pâques 2024. La planification de la période allant de Pâques à la remise en service complète du tunnel de base, qui doit tenir compte des importantes restrictions de capacités dues aux chantiers en Allemagne, en Suisse et en Italie, a été engagée dans la foulée pour s’achever début 2024.
Le SAS s’est largement investi dans ces différentes phases de planification : il a confié aux GI la planification de l’horaire, a participé à la concrétisation et à la coordination des demandes de l’ensemble des parties et a résolu les conflits de commandes avec le concours des ETF et de CFF Infrastructure avant d’approuver les horaires en attribuant les sillons.
S’il a été possible de réaliser la grande majorité du trafic, quoique sur des sillons horaires parfois moins attrayants ou moyennant des temps de trajet plus longs, c’est grâce à l’engagement remarquable et à la flexibilité des représentantes et représentants de CFF Infrastructure et des ETF impliquées dans le processus de planification.
Contribution aux comités de gestion des corridors de fret qui concernent la Suisse
Le règlement relatif au réseau ferroviaire européen pour un fret compétitif (R 913/2010/UE)[1] impose aux GI et aux organes d’attribution des sillons de proposer des offres de sillons harmonisées à l’échelle internationale et adaptées au marché et de simplifier la commande transfrontalière de sillons. Le SAS est impliqué dans les deux corridors qui concernent la Suisse : le corridor Rhin–Alpes et le corridor Mer du Nord–Méditerranée.
Les travaux annuels récurrents sont essentiellement les suivants :
En 2023, les deux corridors ont également étudié l’impact de la proposition de la Commission européenne relative à la planification et à l’utilisation des capacités de l’infrastructure ferroviaire[2] et engagé une réflexion commune afin d’améliorer la coordination des sillons-corridors.
Bases juridiques, réglementation des responsabilités et processus
Le SAS encaisse, auprès des ETF qui font circuler des trains sur les réseaux ferroviaires des GI relevant de sa compétence, les émoluments d’utilisation des sillons et la redevance d’annulation sur facture et au nom des GI (art. 2, let. I OServAS). Afin de déterminer les obligations et responsabilités de chacun, le SAS avait déjà conclu des accords de coopération avec l’ensemble des GI en 2021. Ces accords régissent les rapports de coopération, notamment les tâches concrètes de chacune des parties prenantes, les données à fournir et les échéances y relatives, le controlling, les compétences et la responsabilité.
Suivi et validation des factures avec outil d’aide au calcul du prix des sillons pour les grands GI
CFF Infrastructure détermine le prix des sillons pour les prestations demandées par chacune des ETF sur son propre réseau et sur celui de BLS Netz, du SOB, du HBS et du STB à l’aide du système de facturation I-Prix qui a fait ses preuves. Pour l’heure, les GI concernés établissent encore eux-mêmes les factures destinées aux ETF. Le SAS se charge de les vérifier avant de les valider. Pour garantir le respect du principe de non-discrimination et l’exactitude des informations, le SAS effectue des contrôles mensuels dans les systèmes des GI concernés et surveille le recouvrement des factures ainsi que les réactions des clients.
Exécution pleine et entière de l’encaissement des émoluments d’utilisation des sillons par le SAS pour les autres GI
Depuis 2022, le SAS procède en toute autonomie tant à la facturation qu’à l’encaissement pour tous les autres GI relevant de sa compétence. Il contrôle à cette occasion les données de facturation fournies par les GI et vérifie par échantillonnage si chacune des prestations reçues par les ETF a été correctement saisie. En outre, il met en demeure les mauvais payeurs et analyse toutes les réactions des clients se rapportant à l’encaissement des émoluments d’utilisation des sillons.
En 2023 également, aucun problème lié aux processus n’est à déplorer. Les réactions des clients consistaient exclusivement en des demandes de précision sur les différentes utilisations des sillons. Le SAS a même évolué pour devenir un interlocuteur privilégié des GI et répondre à leurs questions sur l’utilisation correcte du système de tarification des sillons.
Registre de l’infrastructure contenant les indications nécessaires à l’accès au réseau
Le SAS tient le registre suisse de l’infrastructure ferroviaire (RINF-CH), lequel contient des indications spatiales et techniques nécessaires à la circulation sur ladite infrastructure. Les GI sont légalement tenus de saisir et d’actualiser leurs données SIG et leurs données techniques sur l’infrastructure dans le RINF-CH (art. 9u, al. 1 LCdF et art. 15f, al. 2 OCF). Ils répondent de l’exactitude de ces données. En tant que propriétaire et exploitant du registre, le SAS répond de l’accessibilité, de la disponibilité et du développement continu du système.
Le RINF-CH fait partie d’un système européen global. Il est structurellement compatible avec le registre de l’infrastructure ferroviaire de l’Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer (RINF-ERA). Les personnes physiques et les entreprises qui ont besoin d’informations sur les infrastructures ferroviaires n’importe où en Europe, à savoir les ETF et l’industrie du matériel roulant, peuvent ainsi les consulter de manière centralisée. Cette compatibilité est également une condition préalable à la délivrance par l’ERA d’immatriculations de véhicules valables à l’échelle européenne, ce qui représente un gain de temps et d’argent dans le cadre de l’homologation du matériel roulant utilisé à l’international. C’est pourquoi les aspects techniques et opérationnels sont décrits de la même manière dans le RINF-CH et le RINF-ERA.
Amélioration de la fiabilité et de la qualité des données livrées
En 2023, priorité a été donnée à la fréquence de livraison des données et à l’amélioration de leur qualité. À cette fin, un calendrier qui fixe les données à livrer tous les mois a été établi conjointement avec les GI. Celui-ci a été respecté. La qualité des données s’est nettement améliorée au fil des livraisons, de sorte qu’il est dorénavant possible d’importer des données dans le RINF-CH et de les exporter vers le RINF-ERA sans les modifier.
Route Compatibility Check Tool (RCC)
Il appartient aux ETF de vérifier si leurs véhicules sont compatibles avec l’infrastructure sur laquelle elles souhaitent circuler. Pour les aider dans cette tâche, le SAS mettra prochainement à disposition un outil de comparaison, le Route Compatibility Check (RCC). Le RCC fait partie intégrante du RINF-CH. Le développement de cet outil avec le concours des représentantes et représentants des GI et des ETF a toutefois été reporté au cours de l’exercice sous revue pour deux raisons. Il faut premièrement régler certaines questions concernant le processus d’immatriculation des véhicules entre les ETF ou les GI et l’OFT. Deuxièmement, il est prévu d’intégrer directement dans le développement du RCC les nouvelles spécifications techniques d’interopérabilité (STI) que l’UE a adoptées en 2023 (paquet STI 2023).
Poursuite du développement du RINF
L’ERA étoffe régulièrement les informations sur les infrastructures ferroviaires contenues dans le RINF pour l’accès au réseau. Le paquet STI 2023 permettra d’étendre les paramètres d’infrastructure à fournir de 189 aujourd’hui à 310 critères. La Suisse reprendra ces critères supplémentaires. Il appartient donc au SAS de créer les conditions nécessaires à leur intégration dans le RINF-CH. Les travaux préparatoires réalisés à cet effet avec le fournisseur du système INSER sont déjà bien avancés. La phase de développement et d’harmonisation du RINF-CH avec le RINF-ERA débutera, quant à elle, dès que l’ERA aura publié le guide d’application précisant les spécifications requises.
Intégration des « petits » GI
À l’heure actuelle, le RINF-CH comprend uniquement les données d’infrastructure des trois « grands » GI, à savoir les CFF, BLS Netz et le SOB. La prochaine étape consiste à créer les conditions nécessaires à l’intégration des données des autres GI opérant sur le réseau à voie normale, à commencer par l’enregistrement des données géométriques des voies. Le SAS est parvenu à importer les données MTP (modèle topographique du paysage) dans le RINF, ce qui déleste les GI d’une charge de travail importante et leur épargne des frais élevés. Un essai pilote avec les TransN a été mené avec succès. L’intégration d’autres GI opérant sur le réseau à voie normale est en cours. Une fois les données géographiques enregistrées dans le RINF, les GI compétents peuvent saisir leurs propres données techniques sur l’infrastructure.
Révision de l’ordonnance sur l’accès au réseau ferroviaire et de l’ordonnance sur les horaires
Fin novembre 2023, le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) a ouvert la procédure de consultation concernant la révision de l’ordonnance sur l’accès au réseau ferroviaire (OARF)[3] et de l’ordonnance sur les horaires (OH)[4]. La nécessité de réviser ces bases juridiques résulte, d’une part, des adaptations de la LCdF et, d’autre part, de la reprise du règlement d’exécution (UE) 2015/10[5] par la Suisse. Les travaux d’actualisation des dispositions relatives à la planification de l’utilisation du réseau et à l’attribution des sillons ont en outre mis en évidence une corrélation avec l’établissement de l’horaire, raison pour laquelle l’OH a également fait l’objet d’une révision totale.
Le SAS a participé à l’élaboration du dossier soumis à consultation. Il a contribué à préciser la réglementation relative à la planification et à l’attribution des sillons en cas de travaux et à créer les conditions-cadres nécessaires à la définition des priorités applicables dans le règlement des conflits.
Évaluation des instruments : stratégie d’utilisation du réseau et plans d’utilisation du réseau
Le SAS s’est associé au groupe de suivi dans le cadre de l’évaluation externe mandatée par l’OFT en 2023 sur les instruments destinés à garantir les capacités, à savoir la stratégie et les plans d’utilisation du réseau. Il s’agit d’analyser dans quelle mesure ces instruments ont permis d’atteindre les objectifs initialement fixés et comment améliorer encore leur efficacité. Les travaux européens de développement des processus d’établissement de l’horaire doivent également être pris en compte.
Proposition de la Commission européenne relative à la planification et à l’utilisation des capacités d’infrastructure ferroviaire
Le 11 juillet 2023, la Commission européenne a présenté sa proposition d’adaptation des bases juridiques régissant la planification et l’utilisation des capacités d’infrastructure ferroviaire[6]. La Suisse est elle aussi concernée puisqu’elle s’est engagée dans l’accord sur les transports terrestres passé avec l’UE[7] à appliquer une législation équivalente dans le domaine du premier paquet ferroviaire de l’UE. En outre, la Suisse a un intérêt direct à ce que les règles de planification et d’exploitation du trafic ferroviaire soient harmonisées à l’échelle internationale pour mener à bien sa propre politique de transfert de la route au rail.
Le SAS a étudié la proposition en concertation avec CFF Infrastructure, BLS Netz et l’OFT tout en surveillant le processus de décision politique au niveau européen. Il met à profit sa qualité de membre de l’association européenne RailNetEurope, qui rassemble des gestionnaires d’infrastructure et des organes d’attribution des sillons européens, et de la Communauté des chemins de fer européens (CCFE) pour faire valoir les intérêts de la Suisse.
[1] Règlement (UE) nº 913/2010 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relatif au réseau ferroviaire européen pour un fret compétitif. Journal officiel de l’Union européenne, L 276/22, 20 octobre 2022, p. 22-32.
[2] Proposition de règlement sur l’utilisation des capacités de l’infrastructure ferroviaire dans l’espace ferroviaire unique européen, modifiant la directive 2012/34/UE et abrogeant le règlement (UE) nº 913/2010 ; COM(2023) 443.
[3] Ordonnance sur l’accès au réseau ferroviaire ; RS 742.122.
[4] Ordonnance sur les horaires ; RS 745.13.
[5] Règlement d’exécution (UE) 2015/10 du 6 janvier 2015 concernant les critères applicables aux candidats pour les demandes de capacités de l'infrastructure ferroviaire et abrogeant le règlement (UE) nº 870/2014.
[6] Proposition de règlement sur l’utilisation des capacités de l’infrastructure ferroviaire dans l’espace ferroviaire unique européen, modifiant la directive 2012/34/UE et abrogeant le règlement (UE) nº 913/2010 ; COM(2023) 443.
[7] Accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur le transport de marchandises et de voyageurs par rail et par route ; RS 0.740.72RS 0.740.72.